samedi, avril 27, 2024
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Stratégie de rupture en temps de crise : Cas du Mali

Le Mali empêtré dans une crise politique et sécuritaire profonde depuis quelques années et lâché par ses principaux partenaires qui sont la CEDEAO et la France, cherche à se sortir par le haut.
Par conséquent, face à l’adversité, il utilise la stratégie de rupture semblable à celle d’un fauve blessé et encerclé par ses prédateurs. Dos au mur, il n’a plus d’autres choix que de se surpasser et transformer sa peur en bravoure et sa faiblesse en force pour se sortir du piège mortel.

Dans cette situation d’isolement et de mort certaine, d’autres prédateurs, comme dans la jungle, vont avoir de l’empathie pour le fauve blessé et encerclé et voleront à son secours pour le libérer du danger de mort qui plane sur sa tête. Une fois libéré et profitant de cette aide inattendue et inespérée, pendant qu’il soigne ses blessures, il chercherait à mettre à distance ses prédateurs avérés. Cette stratégie de rupture pourrait alors déboucher sur une stratégie de négociation gagnante.
En expulsant l’Ambassadeur français, le Mali joue sa survie de fauve blessé et encerclé.

Une telle stratégie de rupture provoque en général deux réactions possibles :
1/ La France abasourdie par le courage de nouveaux dirigeants maliens et décontenancée par cette décision inattendue, elle pourrait se retrouver dans une situation délicate. Celle de ne pouvoir réagir suite à un tel coup de massue. Elle serait amenée à faire profil bas et chercherait à négocier avec la junte qu’elle traite d’illegitime pour préserver ses intérêts au Mali et maintenir sa présence militaire dans le Sahel.

2/ ou à contrario, touchée dans son orgueil et se sentant humiliée et menacée de tout perdre, la France pourrait réagir par la force en cherchant à intervenir militairement sous mandat de l’ONU ou de la CEDEAO par le truchement d’une résolution taillée sur mesure.

L’HOSTILITÉ ET L’ACHARNEMENT PEUVENT CONDUIRE A UN RENVERSEMENT SOUDAIN DE LA SITUATION.

La peur peut brusquement changer de camp. Le rapport de forces peut s’inverser au profit du faible.
Cas d’école : du néant peut émerger une resilience qui laisserait entrevoir une lueur d’espoir obstruée par un effet d’optique éblouissant.
L’on peut citer l’exemple du Rwanda qui a usé de cette stratégie de rupture avec la France et la Belgique, qui s’est révélée concluante.

SE CROIRE INVINCIBLE ET INDISPENSABLE CONDUIT A UNE ERREUR D’APPRÉCIATION D’UNE SITUATION SUPPOSÉE MAÎTRISÉE

Aujourd’hui, la France mesure sa faiblesse au Mali par le rejet du peuple malien qui la portait hier en sauveur et par la solidarité sans faille de son peuple uni.

Dans tous les cas, les dés sont jetés. La rupture est consommée. La France laisserait des plumes même si elle ne perdrait pas le Mali. Sa présence militaire dans le Sahel serait questionnée.

RESTE UNE INCONNUE :

La réaction du peuple français qui paye un lourd tribut sur le plan humain et financier dans une guerre qui lui semble lointaine et justifiée par la lutte contre le terrorisme international.
Cette situation serait-elle tenable à moyen et long terme pour la France ?

COMMENT SE JUSTIFIE LA DÉCISION DU MALI ?

Face à ce danger, le Mali a pris le devant pour imaginer ce scénario de rupture et palier au départ de la France, considérée comme un allié encombrant, déstabilisant et mortel, en prenant la précaution de nouer un partenariat militaire et économique avec la Russie.
Autre motivation de taille, c’est l’adhésion du peuple malien aux actions de la junte et sa totale solidarité.

« POKER MENTEUR » OU « JEU DU QUITTE OU DOUBLE » ?

Acculé et dos au mur, le Mali ne fait pas de mystère sur son avenir. Deux de ses voisins se retrouvent dans la même situation que lui. Ils forment à 3 une nouvelle situation jamais envisagée : 3 pays voisins connaissant le même sort. En moins d’un an, 3 changements de régimes civils par des régimes militaires. Les écoles de guerre et les instituts de sciences politiques n’ont jamais prévu un tel scénario catastrophe.
Force est de constater que le Mali est certes esseulé mais ne se retrouve pas totalement isolé. Par manque de vision à long terme, la CEDEAO a décidé de le sanctionner et de fermer ses frontières, encouragée par la France, qui, à son tour a fermé ses frontières.

Cette stratégie d’isolement est en train d’échouer grâce à la solidarité de la Guinée et de l’Algérie voisines. Cette décision d’isolement peut remettre en cause la légitimité même de la CEDEAO et pourrait pousser d’autres pays de la sous region, sous l’impulsion de leurs populations, à emboîter le pas au Mali.
Cette situation peut, à termes, profiter au Mali qui joue son « va tout », à quitte ou double.

Si sa stratégie de rupture réussit, la junte fera d’une pierre deux coups : elle sera reconnue et légitimée. Elle sera en position de force pour entamer avec la CEDEAO et la France, des négociations à son avantage.

UNE ÉQUATION DIFFICILE À RESOUDRE

Le réveil des peuples et leur rejet des décisions des institutions internationales et sous régionales sanctionnant leurs États, pourraient-ils accélérer la stratégie de rupture en Afrique francophone ?

L’avenir nous enseignera et l’histoire retiendra.

Moustapha Dahleb

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