Situé dans le sud-est du Tchad, à la croisée des frontières avec la Centrafrique et le Soudan, le Paysage d’Aouk-Keïta (PAK) s’impose comme un bastion de biodiversité et de mémoire vivante.
Sur plus de 33 000 km², cette zone longtemps marginalisée renaît grâce à une alliance entre conservation écologique et engagement communautaire.
Ancienne aire de chasse, l’Aouk-Keïta a vu ses ressources naturelles décliner depuis les années 1970, victimes de conflits, de braconnage et de pratiques agricoles non durables. Mais depuis 2020, un partenariat entre le gouvernement tchadien, African Parks et l’Union européenne œuvre à sa restauration.
La deuxième phase du projet (2024–2027) prévoit un plan d’utilisation des terres et la création d’aires protégées pour préserver la connectivité écologique et les services écosystémiques.
Les résultats sont déjà visibles : lions, lycaons, hippopotames et autruches réapparaissent dans les savanes boisées et plaines inondables, dont certaines sont classées zones Ramsar depuis 2006. Le PAK devient ainsi un maillon stratégique entre les parcs de Zakouma, Siniaka Minia et ceux du nord-est centrafricain.
Mais l’Aouk-Keïta n’est pas qu’un sanctuaire naturel : c’est un espace vital pour cultivateurs, pêcheurs et éleveurs transhumants. À Dingirti, M. Sylvain Nagylom témoigne : « La gestion de la zone est une bonne chose, car elle va nous aider à mieux protéger les zones de pêche. »
À Massambagne, Mahamat Idriss observe le retour de la faune et l’amélioration de la sécurité : « La conservation nous offre des avantages tels que l’emploi, l’école et la protection. »
Pour les familles transhumantes comme celle d’Alhadj, l’Aouk reste un refuge malgré les défis liés à la pression sur les pâturages : « L’Aouk est pour nous les Tchadiens. Il nous donne de la sécurité », confie-t-il.
Sur le plan de la sensibilisation, de la lutte anti-braconnage et des visites éducatives à Zakouma, plus de 400 personnes ont été impliquées dans le dialogue environnemental. Des chefs de canton et de village, comme Ali Barcham et Brahim Yakhoub, relaient les messages de préservation : « L’Aouk-Keïta, c’est l’avenir pour les enfants. »
En attente d’un accord de gestion à long terme, le Parc d’Aouk-Keïta incarne une vision territoriale où écologie et développement local avancent main dans la main. Un héritage naturel, mais surtout humain.
Ali Moussa
